Posted by admin | November 2, 2011
Suite aux tracas de santé d’Auré, et suivant les conseils du médecin, nous réservons un bus pour aller à Potosi le 28 au matin. Nous arrivons au terminal de bus, chargeons les sacs et les vélos sur le toit en regardant d’un air inquiet le vieux bus dont les nombreuses pièces manquantes n’ont pas l’air de perturber les locaux. Et c’est le départ dans un grand nuage noir de fumée d’échappement. Nous quittons la ville, enfin… 500m plus loin, le bus s’arrête. Que se passe-t-il ? Personne ne le sait, mais à nouveau, seul les 4 étrangers se posent des questions. Le moteur hurle, le bus refait quelques mètres, puis entame un demi-tour et rentre au terminal d’Uyuni. Les habitués s’empressent de retourner au guichet sans même s’inquiéter de savoir ce qui s’est passé. Ils ont l’habitude. Le bus a un problème technique et ne partira pas. On décharge les vélos et les sacs et suivons une personne de l’agence venue nous chercher et chargeons le tout dans un autre bus une demi-heure plus tard. C’est un bus d’une autre compagnie, presque plein, dans lequel nous nous retrouvons entassés. Ils donnent les dernières places assises aux touristes, les autres resteront debout pendant les 5 heures qui nous séparent de Potosi.
On nous avait dit que la route était goudronnée. Nous découvrons qu’une petite partie l’est mais le reste est encore une piste, partiellement en travaux. Les véhicules qui montent sont dans des états plus catastrophiques les uns que les autres. En première dans les grosses montées, laissant derrière eux des nuages de fumée noire… Notre bus n’est guère mieux que les autres.
Nous arrivons à Potosi, ville la plus haute du monde, à l’ancien terminal de bus, en contrebas du centre. Potosi ressemble à premier abord à San Francisco ! Des rues presque verticales se dressent devant nous. Chargés comme nous le sommes, la montée vers le centre sera costaude.
Dans cette montée, nous nous faisons rattraper par 3 coccinelles qui n’iront que quelques mètres plus haut que nous avant de s’immobiliser au milieu de la route. Elles n’arrivent pas à grimper la pente. Les voitures callées derrière eux klaxonnerd-services.bent par se faire remorquer. Nous découvrons une ville dont toutes les rues sont en dur, au trafic intense.
Les boliviens sont fiers de raconter que Potosi a été à l’époque coloniale aussi grande que Paris et Londres réunis. Aujourd’hui, elle n’abrite plus quelques milliers de personnes. Potosi finança l’Empire Espagnol par ses mines d’argent. Les conditions de travail furent atroces : On estime que 8 millions d’esclaves indiens et africains sont décédés dans ces mines de 1545 à 1825.
Aujourd’hui, ces mines sont toujours en exploitation. Les conditions de travail n’ont guère changées mais les mineurs travaillent pour leur propre compte (coopérative). Mais ces mines sont presque qu’épuisée (les boliviens expliquent que les espagnols auraient extrait assez d’argent pour construire un pont entre les deux continents …) et la valeur du minerai a fortement baissé.
La ville est devenue plutôt pauvre et les mineurs extraient à peine assez de minerai pour se nourrir.
Dave décide de visiter les mines. Auré préfère éviter avec ses problèmes respiratoires. L’air qu’on respire dans les mines est chargé de gaz nocifs.
Lever de bonne heure, le groupe constitué de 4 hollandais, deux péruviens et Dave s’équipent de vêtements imperméables, bottes, casque et lampe frontale et partent au marché des mineurs. On peut y acheter feuilles de coca, eau, limonade, matériel, et … dynamite. Ici, c’est en vente libre, même pour les enfants. Nous achetons quelques cadeaux pour les mineurs, c’est une tradition ici.
Ensuite, nous visitons une raffinerie. Des machines anciennes pleines de réparations maison mais efficaces isolent l’argent du minerai. Procédé initialement au plomb, il a été remplacé… par un procédé tout aussi toxique. Nous montons sur le Cerro Rico, montagne perforée de plusieurs centaines de mines. L’entrée de la mine, en pierre est couverte de taches noires. C’est le sang du lama qui est offert annuellement à Tio, le Diable, maître des mines. Des chariots sont couchés sur le sol.
Nous entrons dans la mine. Les passages ne sont pas hauts et on doit régulièrement se courber pour ne pas se cogner la tête. Par endroits, des éboulements de pierre au plafond sont retenus par des poutres, souvent cassées. Pour passer d’un niveau à l’autre, il faut se faufiler par des passages étroits.
L’air est à peine respirable, malgré le foulard qui nous couvre le nez. Nous ne rencontrerons malheureusement pas de mineurs au travail. Le dernier vendredi du mois est consacré aux offrandes à Dieu et à Tio. Cette tradition est suivie d’une soirée très arrosée. Nous sommes le samedi qui suit.
Nous rencontrons la statue de Tio ou sont faites les offrandes de feuilles de coca, d’alcool pur et de tabac. C’est avec ce même alcool pur que les mineurs ont passé leur soirée la veille.
A défaut d’avoir rencontré de mineurs, nous décidons de regarder « The devil’s miner » le lendemain soir. C’est un film qui a été tourné dans ces mêmes mines, expliquant l’histoire des mineurs, et plus particulièrement des enfants travaillant dans les mines. Ils sont plus de 800. Il faut savoir qu’avec les conditions de travail dans les mines, les mineurs ne vivent rarement plus de 35 ans. Quand un enfant commence à 10 ans…
Ce film nous a tout les deux retourné car étant en Bolivie (pays le plus pauvre d’Amérique du Sud), il ouvre les yeux sur beaucoup d’inégalités que nous avions déjà remarquées. Beaucoup d’enfants travaillent ici, souvent pour aider leurs parents dans les restaurants, échoppes, …, souvent après l’école aussi mais tous n’y ont pas accès. En effet, même si elle est gratuite, il faut payer les uniformes, le coiffeur, les fournitures scolaires, …
Dans ce documentaire, le garçon, orphelin de père, a 14 ans et travaillent depuis 4 ans dans les mines pour survenir aux besoins de sa famille. Il gagne entre 2 et 5 BOL (20 et 30 cent€) par jour. Pour aller à l’école, il doit économiser sur la nourriture. Ce gamin rêve de devenir professeur et de quitter les mines mais pour faire des études ici, il faut de l’argent …
C’est sous ce contexte que Potosi devient impressionnant ! Sans ce contexte, vous visiterez une ville avec de beaux vestiges coloniaux, + de 80 églises mais passerai à côté du vrai côté de la Bolivie et de sa pauvreté.
Concernant les beaux vestiges, nous avons visité l’hôtel des monnaies. Cet immense bâtiment-forteresse fut bâti par les espagnols pour frapper leurs pièces de monnaies lors de l’époque coloniale. La visite est intéressante sans être extraordinaire.
Le reste du temps, nous nous promenons dans la ville, pour la découvrir au hasard des rues. Une chose qui nous frappe est l’étrange règle de priorité : c’est le premier qui klaxonne qui peut passer en premier. Cette règle est aussi valable contre les piétons. Du coup, toutes les voitures qui approchent d’un carrefour klaxonnent préventivement pour s’assurer la priorité !
Toutes les photos de Potosi ici.